Article par Gaëlle Berger-Vaugier

La journée s’annonce calme, le trajet de la Baie aux Outardes à Havre Colombier rapide et facile. C’est pourquoi l’équipage nous propose d’en profiter et d’essayer de faire le trajet à la voile. Avant de partir, nous pratiquons différentes manipulations pour être capable, une fois l’ancre levée, de border et choquer les voiles pour les ajuster selon le vent. Nous revoyons aussi les principes de changement d’amur et de virement de bord avec notre capitaine Ariane et Bruno. On nous avertit : les manœuvres que nous aurons à effectuer seront exigeantes : il est essentiel d’être alerte et attentif aux instructions.

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Sur le pont, on nous assigne un poste : une fois que la longueur du mouillage est réduite de quatre marques, je dois, avec cinq de mes camarades, hisser la grande voile sous la supervision de Peter. Puisqu’il vente beaucoup, nous prenons un ris, ce qui signifie de monter la grande voile au ¾. L’étape suivante est de terminer de lever l’ancre. Une fois que c’est fait, Olivier et moi aidons à lever le foc. C’est le premier départ à voile réussi avec autant de vent pour le Roter Sand!
Lorsqu’on navigue à voile, il est essentiel de louvoyer lorsqu’on est face au vent. Cette technique de navigation consiste à effectuer de grands zigzags afin de garder un angle favorable au vent.

On s’apercoit rapidement que la journée qui s’annoncait calme ne l’est pas : les vagues sont plus hautes que prévu et une bonne partie des stagiaires a l’estomac à l’envers. Après quelques temps, l’équipage constate que les conditions météorologiques font en sorte que nous nous éloignons de notre destination. La décision est donc prise, on repart le moteur et il faut rabaisser les voiles. J’ai eu la chance de participer à une manœuvre vraiment excitante pour une néophyte : aller sur le beaupré pour assister Bruno et Ariane à plier le foc. On se sent vraiment petit lorsqu’on se retrouve face au fleuve de cette façon.

La belle journée (tout du moins pour moi) se poursuit dans la cuisine : Félix et moi assistons Bruno lors de la confection d’un gâteau à la salade de fruit. Ce petit dessert réchauffera le cœur de nos compatriotes une fois le soir venu.

Pendant les heures qui suivent, je profite des vagues puis fais la vigie avec Maude, Olivier et Félix à l’avant du bateau. Nous commençons à avoir froid lorsqu’Alexis nous apporte des tasses de bonne soupe chaude. C’est à ce moment que nous le baptisons Alexis ‘’le messie’’.
L’arrivée à Havre Colombier est pour plusieurs une délivrance. L’endroit est d’une majestuausité inestimable et beaucoup plus calme. C’est en arrivant que je constate à quel point cette journée m’a rapprochée du fleuve… Sa force et sa beauté me laissent perplexe, tout comme son imprévisibilité.

Cette étendue d’eau qu’on nomme souvent simplement « ressource » est en fait une force incommensurable, pleine de vie, que nous ne saisirons jamais entièrement. Naviguer à voile permet de se connecter avec le fleuve, de se l’approprier un peu. On m’a souvent dit que le fleuve Saint-Laurent est au cœur de la société québécoise, de son économie, de son histoire et de son identité. Pour la première fois, je l’ai ressenti.